Le principe du jeu de role est de faire evoluer des personnages
imaginaires, incarnes par les joueurs, dans un monde imaginaire,
gere et decrit par le maitre de jeu.
Une partie de jeu de role est un echange oral permanent entre
les joueurs et le maitre de jeu ou chaque joueur decrit les actions
du personnage qu'il incarne, et assume parfois le role de ce dernier.
Le maitre est charge de gerer le monde dans lequel evoluent les
personnages des joueurs (PJ). Il le decrit en permanence, determine le
resultat des actions des PJ, decide en consequence des actions des
personnages qui ne sont pas incarnes par des joueurs (PNJ), et assume
parfois leur role.
Cet article traite des droits de chacun sur le deroulement de l'histoire, joueurs et maitre, de l'equilibre a trouver, qui depend essentiellement du maitre, du degre d'improvisation qu'il s'accorde. Cet article plaide pour une meilleure utilisation de l'improvisation, et propose une facon de rediger des scenarii qui ne restreigne pas la liberte d'action des joueurs.
Liberte des joueurs et improvisation
Etant donne son role, le maitre de jeu a en pratique tout pouvoir sur l'histoire - il controle le monde en totalite, ainsi que la reussite ou l'echec des actions des joueurs (il ne tient qu'a lui d'appliquer ou non les regles). Il peut donc controler totalement le cours de l'histoire, et notamment, amener les joueurs a suivre la voie qu'il a preparee.Il existe cependant, meme pour le plus dirigiste des maitres, une part necessaire d'improvisation, due au fait que les joueurs ont des reactions imprevisibles. Le maitre doit improviser une conversation avec un PNJ, par exemple. On voit ici que la liberte d'action des joueurs est liee tout particulierement au degre d'improvisation que le maitre s'accorde.
De facon plus generale, les joueurs ont en theorie, autant de droits sur l'histoire que le maitre de jeu. Ils devraient meme avoir une liberte d'action totale, mais comme le monde est imagine et decrit par le maitre, celui-ci ne peut se comporter comme une interface "passive" entre les joueurs et le monde. Il convient donc de trouver un equilibre entre les droits de chacun sur l'histoire.
L'improvisation
L'improvisation faible, est celle decrite plus haut. Elle concerne les evenements qui sont decrits aux joueurs, et plus la description elle meme, que les evenements. Les evenements ne sont pas improvises (le maitre sait par exemple ce que le PNJ doit dire en substance, ce qu'il sait), mais leur description, parce qu'elle depend des joueurs, est necessairement improvisee (la conversation depend du joueur, mais c'est loin d'etre le seul exemple). On peut etre force d'improviser des elements de decor egalement, sur une question d'un joueur. Cette improvisation est irreductible.L'improvisation forte est tout le contraire - il s'agit d'une improvisation totale ou quasi-totale. C'est a dire que meme en ayant un fil conducteur, le maitre improvise les lieux et les personnages. Il peut savoir qu'un lieu existe, et ne pas l'avoir prepare. En ce cas, il est force d'improviser le details dont il aura besoin.
Enfin, on peut envisager une "improvisation moyenne", pour laquelle je vais plaider dans la suite de cet article. Il s'agit d'improviser, non pas les elements du monde, et leur nature, mais leur comportement (par exemple, connaitre les buts d'un PNJ, mais pas ce qu'il va faire par avance, et le determiner notamment en fonction de ce qu'ont fait les PJ).
L'Arene, l'improvisation preparee...
Nombre de scenarii sont ecrits de facon "lineaire", et par consequent, forcent le maitre a user de son pouvoir, et a se montrer, meme discretement, dirigiste. Il est parfois necessaire de diriger l'action, mais cela pose un reel probleme, quand le maitre entre en conflit avec les joueurs parce qu'ils ne souhaitent tout simplement pas suivre ce qu'il a prevu. Quand le dirigisme devient apparent, les joueurs se rebellent, parce qu'ils entendent avoir un droit sur l'histoire - l'interactivite est le principe meme du jeu de role, sinon, il vaudrait mieux aller au cinema. Par honnetete de plus, il convient a mon sens, de laisser une reelle liberte aux joueurs, c'est a dire une plus grande part d'improvisation que la partie strictement irreductible.Pour cela, je plaide pour une improvisation plus importante, et meme une part d'improvisation laissee volontairement dans la preparation du scenarii. C'est a dire la conception d'une Arene, un cadre defini par le maitre, prepare, dans lequel les joueurs sont libres.
Une Arene doit comporter :
- L'intrigue, c'est a dire le cadre de l'action, ce qui s'est passe qui a amene une situation particuliere, et en quoi les personnages peuvent etre meles a l'action.
- La description, aussi precise que possible de tous les lieux que les personnages peuvent etre amenes a visiter. C'est a dire que pour etre vraiment bien preparee une arene necessite de preparer egalement des lieux que les PJ ne visiteront jamais.
- La description des PNJ qui vont intervenir dans l'intrigue, leurs buts, leurs plans. C'est leur comportement, qui sera improvise justement d'apres leur description et en fonction des actions des PJ, si tant est qu'ils arrivent a influer sur les plans des PNJ. Il faut simplement que cette improvisation reste coherente avec les buts et les caracteres, ce qui se fait aisement.
- Eventuellement, quelques scenes, un peu comme au cinema, des descriptions, des evenements qui pourraient se derouler devant les PJ, qu'on peut - ou non - replacer pour colorer l'histoire. Ces scenes ne doivent etre placees bien entendu que si la situation s'y prete. Elles auront alors l'air tout ce qu'il y a de plus naturelles.
- Enfin, des pistes - c'est a dire, au moins, plusieurs facons pour les PJ d'intervenir dans l'histoire, et cette phase demande de la part du maitre de faire d'autant plus preuve de dirigisme, s'il n'y a qu'une facon pour les PJ d'intervenir (les faire detrousser, pour que, ayant besoin d'argent, ils doivent necessairement se faire engager par untel...hem.) Il peut etre utile de prevoir quelques pistes au cas ou les joueurs feraient quelque chose de particulier. Mais en aucun cas, trop prevoir une facon pour eux de reussir a demeler l'intrigue, car cela conduit a les aiguiller vers cette solution.
Dans l'ideal, il serait meme bien de placer les PJ dans un endroit donne, et de prevoir plusieurs intrigues sur lesquelles les PJ pourraient intervenir (une ville est dans ce cas le cadre assez ideal, car elle propose nombre de sujets interessants a developper).
Un moyen radical est egalement de placer les PJ dans une situation reclamant une solution, et de voir celle qu'ils proposent...cela demande moins d'effort de la part du maitre, car il n'a pas a imaginer quelle serait une solution, mais juste a gerer la facon dont les joueurs comptent se debrouiller.
La solution, a mon sens, est pour le maitre, de plus improviser les evenements, et meme de preparer cette improvisation dans la conception du scenario. Presenter les scenarii de cette facon permet aussi au maitre qui veut les faire jouer d'apporter plus de materiel qui lui soit plus adapte ou plus familier. La "personnalisation" du scenario se fait alors a travers la partie necessaire d'improvisation.